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Ne rien faire c’est bien faire

J’aurais pu donner un autre titre pompeux genre « primum non nocere » mais comme j’ai fait espagnol en deuxième langue je vais éviter le latin.

Il y a un sacré paquets de truc en médecine qui sont réalisés dont on pourrait se passer. Le dépistage est un exemple connexe complexe mais très pertinent. Merci à Jaddo d’avoir fait sa dernière note avec son talent habituel.

Moi, je veux juste parler de ce que je rencontre dans mon métier d’anesthésiste-réanimateur. Il y a un paquet de trucs que je vois souvent et je m’interroge quant à notre tendance à intervenir en excès. Nous avons un métier où la physiologie se vit « en live », avec des médicaments puissants aux effets immédiats, nous sommes donc imprégnés d’une culture de l’action. De plus, y’a quand même un paquet de littérature qui nous enjoint à agir vite dans bon nombre de situations médicales comme les urgences vasculaires, les infections, etc.

A côté de ça, je vois bon nombre de fois où nous dégainons, vite, trop vite ? certains outils :

  • l’eau et le sel (pourquoi cette obsession des 2 litres de diurèse ? méfiez-vous des excès de chlorure)
  • les macromolécules (encore ? seriously ?)
  • l’amiodarone (le poumon, la thyroïde, le contrôle douteux de la FC en situation très aigüe : saignement latent, sepsis larvé ?)
  • l’atenolol (cf les béta-bloquants c’est pas tout le temps)
  • le fer en intraveineux (je n’arrive pas à l’aimer celui-là, c’est un peu irrationnel mais il me crispe)
  • les morphiniques en per-opératoire (par crainte de la douleur…)
  • les cocktails tramadol-nefopam (les EI valent-ils le coup vis à vis d’une éventuelle diminution de morphine ?)
  • l’insuline trop agressivement
  • la dialyse en réa quand le patient va planter son rein (cf TBL sur ELAIN vs AKIKI)
  • l’hydroxyzine comme une tisane au tilleul
  • les anti-épileptiques dès que le patient a une douleur sous morphine
  • la nutrition parentérale sans contexte clairement en faveur
  • les vitamines, les oligo-éléments dans un glucosé pendant 3 jours
  • les vitamines autre que B1 dans la prévention du DT
  • de l’IPP prescrit comme un réflexe dans 1000 situations où les patients n’en ont pas besoin
  • les aminosides dès qu’une infection pointe le bout de son nez à l’hôpital

et la biologie, parlons en !

  • pourquoi faire NFS/TP-TCA a un patient qui a déjà été opéré sans soucis sans manifestations hémorragiques ?
  • que faite vous d’une coag post-op chez quelqu’un qui n’a pas fait de catastrophe hémorragique ?
  • pourquoi faire une carte de groupe pour une chirurgie où vous transfusez un patient tous les 5 ans ?

Je m’arrête là, vous saisissez l’idée… Je pense qu’il y a un bon paquet de fois où il faut se retenir de dégainer son stylo, surtout pendant le tour de minuit où la réflexion n’est pas toujours au top. Il y a plein de situations où ne rien faire, c’est bien faire. Il y a plein de symptômes qui méritent notre attention mais qu’il ne faut pas confondre avec une maladie (c)celui-qui-sait. Il y a plein de fois où juste attendre à côté du patient est suffisant. Et il y a plein de fois où nous faisons peut-être pire que mieux en prescrivant.

Ainsi, il me parait vraiment important de vous arrêter 30 secondes lorsque vous êtes devant un dilemme de prescription. Interrogez-vous sur votre « impulsion » : habitude ou besoin de donner une réponse (facile) à une question difficile (« je fais quoi ? »).

Bon. Je perçois que ce billet prend un ton moralisateur-à-la-con et je ne m’étendrai pas plus mais je crois vraiment très fort à cette idée que les patients font souvent très bien sans nos prescriptions et qu’il suffit de se laisser un peu de temps et de recul.

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un lendemain de garde

Cette nuit j’ai (encore) du faire face à la violence des urgences, aux drames de la vie, et aux soignants dyscommuniquants face auxquels je n’ai pas encore la sagesse de tendre l’autre joue.

La violence, la mort, la brutalité. Dans le monde extra-médical, ce sont des évènements rares, des trucs horribles auxquels on survit parce qu’on ne les vit pas tous les jours. Et puis parfois, les deux mondes s’entrechoquent, la vie, ma vie et l’hôpital, mon hôpital. C’est dur.

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Trois gardes

Trois gardes. Trois gardes en six jours, c’est trop. Je le sais bien mais souvent ça passe… Là quand les difficultés s’amoncellent sur les trois gardes, sur trois sites différents, la stature médicale se fissurent.

Au fil de la nuit le sentiment de ne pas avoir « LA » bonne idée est d’autant plus désagréable que l’on voit le patient se dégrader à vitesse grand-V. Les IDE rappellent dès que je quitte la chambre, je réexplique, impuissant, j’ai le sentiment depuis le début de la nuit que je ne pourrais rien pour ce patient mais il est jeune et tout le monde s’inquiète. Le lendemain matin, l’oeil du grand chef est difficile à encaisser. Vraisemblablement je quitte la garde en laissant un patient mourant.

Même en décrochant son téléphone, même avec la sympathie des collègues de galère nocturne, la sensation de solitude est bien là.

Alors voilà, je vais essayer de faire comme à chaque fois, me dire que j’ai fait les choses avec la meilleure intention possible, mais ça pèse. Dans quelques minutes, je vais regoûter à l’air du jour, à la vie. Appuyer sur les pédales de mon petit vélo vers ‘m baraque me reconnectera aux miens. J’espère qu’un peu de sommeil gommera le poids sur la poitrine.

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Pascal et le Colonel Moutarde

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