J’ai l’impression que le français est un peu ambivalent en matière d’alimentation. D’un côté nous sommes le royaume de la Gastronomie, de l’autre nous sommes imprégnés d’angoisses autour de la malbouffe. Les médias ont bien sûr contribué largement en dénonçant les contaminations toxiques. En fait nous sommes simplement / malheureusement / fortuitement désormais au courant. Nous n’ignorons plus ces faits. Comment vivre avec ça ?
Catégorie : nutrition
Je partage ici des idées, des commentaires ou des astuces pour optimiser son alimentation dans la vie de tous les jours ou plus particulièrement dans un contexte sportif. J’aborde également des questions plus médicales concernant la nutrition, notamment la nutrition artificielle nécessaire pour les patients les plus fragiles, agressés ou dénutris.
Je viens de finir la lecture d’Alcool, vin et santé écrit par Michel de Lorgeril, médecin cardiologue, et Patricia Salen, diététicienne.
J’étais très enthousiaste avant d’ouvrir le livre connaissant la plume acerbe et la connaissance du sujet de Michel de Lorgeril. Je suis déçu. Ce thème polémique est vulgarisé à l’extrême, j’espérais un bouquin plus solide où les références seraient mieux reliées aux propos et un peu moins partisanes.
je suis abonné à un site qui analyse les compléments alimentaires : consumerlab.com.
Dans leur dernière newsletter, ils reportent la consommation habituelle de 1500 personnes, c’est intéressant.
Les protéines (ou protides qui est un synonyme) ont surtout un rôle structurel, de transport et de messager dans l’organisme. Les protéines sont constituées de briques appelées les acides aminés. Elles peuvent fournir de l’énergie mais leur rentabilité est moindre que les glucides et les lipides. L’oxydation préférentielle des glucides et des lipides est probablement un avantage sélectif qui économise des acides aminés essentiels que notre organisme ne peut pas synthétiser.
Les sirtuines constituent une famille de protéines très conservée au fil de l’évolution, des micro-organismes aux mammifères ce système de régulation du métabolisme est présent.
La recherche sur les sirtuines a été mise au goût du jour avec les travaux sur la restriction calorique. Ces travaux démontrent qu’en donnant moins à manger à des levures, des ptits vers C. elegans ou des souris, ces animaux vivent plus longtemps que leurs congénères.
Il existe aussi sur la même thématique une magnifique étude dans Science (Science 10 July 2009: 201-204) qui reporte le suivi pendant 20 ans des macaques, les résultats sont édifiants :
La nutrition parentérale apporte aujourd’hui les trois classes de macronutriments : glucides, acides aminés et lipides. Cela n’a pas toujours été le cas. Les émulsions lipidiques constituent une véritable innovation pharmacologique pour les patients bénéficiant d’une nutrition parentérale. L’Intralipide fut la première émulsion lipidique commercialisée au début des années 1960. L’apport de lipides a permis de prévenir les carences en acides gras essentiels et de diminuer les apports glucidiques majeurs qui dépassaient finalement les capacités d’oxydation de l’organisme, aboutissant à la stéatose hépatique.
Les émulsions lipidiques sont une innovation pharmacologique dans le sens où il n’était pas évident de synthétiser des micelles lipidiques microscopiques, stables sur le plan physico-chimique et tolérables pour l’organisme.
L’huile de soja est l’huile de référence utilisée dans l’Intralipide. Les émulsions d’huile de coton ont été écartées du fait d’une très mauvaise tolérance. Par la suite, au milieu des années 1980, les industriels ont développé de nouvelles émulsions, associant de l’huile de coco apportant des triglycérides à chaîne moyenne : le Medialipide. Ensuite, un autre laboratoire a développé une émulsion basée sur l’huile d’olive : le ClinOleic, argumentant essentiellement sur la meilleure tolérance au long cours de l’émulsion.
Quels sont les avantages de ces émulsions de seconde génération ?
Les avantages théoriques des triglycérides à chaîne moyenne sont les suivants :
- béta-oxydation facilitée du fait du plus grande affinitée pour la lipoprotéine lipase et d’un passage transmembranaire mitochondrial indépendant du transport par la carnitine.
- pas d’implication dans la synthèse de l’acide arachidonique donc neutralité sur les prostaglandines
- toxicité hépatique moindre mais les études cliniques sont contradictoires.
- pas d’accumulation dans le système réticulaire endothélial pouvant pertuber l’immunité
- Probablement une influence moindre sur le rapport ventilation/perfusion que les émulsions composées uniquement de TCL comme l’Intralipide.
Les avantages théoriques de l’émulsion riche en huile d’olive sont essentiellement liés à la diminution de la quantité d’huile de soja, riche en acides gras polyinsaturés de la ligne n-6. Ce concept sera prolongé avec les émulsions de troisième génération qui en panachant différentes émulsions lipidiques diminuent les effets indésirables des excès de triglycérides à chaîne longue. Cette évolution passe surtout par l’adjonction d’huile de poisson. Les deux nouvelles émulsions sont le Lipoplus et le SMOFLipid. Le premier contient un mélange de TCM et de TCL et 10% d’huile de poisson. Le SMOFLipid est un mélange d’huile de soja, de TCM, d’huile d’olive et d’huile de poisson selon une répartition 30%/30%/25%/15%. Les huiles de poissons sont également disponible en émulsion séparée sous la dénomination commerciale d’Omegaven avec une littérature orientée sur l’amélioration de l’oxygénation des patients en SDRA.
Les huiles de poissons ont pour avantage essentiels de moduler l’inflammation en orientant la synthèse des prostaglandines vers des dérivés plutôt anti-inflammatoires.
La littérature médicale sur ces nouvelles émulsions est balbutiante. Il existe notamment des arguments en pédiatrie démontrant la très bonne tolérance hépatique des huiles de poissons ; ce qui peut être particulièrement intéressant pour ces jeunes patients souffrance souvent d’un grêle court. Il commence à exister quelques arguments pour une utilisation en périopératoire de chirurgie lourde sans conséquence néfaste sur la coagulation.
La dénutrition à l’hôpital est endémique. Selon les enquêtes de prévalence près de 40% des patients hospitalisés sont atteints.
Question simple : comment se fait-il que si peu de médecins soient sensibles à une pathologie qui touche près de 1 patient sur 2 ? habitudes, manque de formation, manque de moyen d’évaluation?
En tout cas il nous incombe à tous, soignants, de lutter contre l’auto-cannibalisme hospitalier. Le pronostic des patients est en jeu.
Insuffisant cardiaque cachectique, insuffisant respiratoire aux muscles défaillants, insuffisant rénal qui voit son aminogramme s’effondrer pendant la dialyse, cirrhotique au maillon intestinal faible, patient âgé en traumatologie qui glisse au fond du lit creusant peu à peu des escarres, enfant en croissance atteint d’une maladie inflammatoire chronique, polytraumatisés et grands agressés de la réanimation… tous méritent une attention nutritionnelle.
Un phénomène qui me frappe vraiment est la bizarrerie logistique de l’hôpital qui fait dîner les patients à 18h30 et qui leur sert ensuite un petit-déjeuner entre 8h et 9h… plus de la moitié de la journée est ainsi passée à grignoter du muscle si important pour préserver l’autonomie du patient, son immunité et son métabolisme.
Poids, perte pondéral voilà des indicateurs fiables et peu onéreux : utilisez les !
Enrichir les repas, proposer des compléments alimentaires (dont un le soir après le grignotage de 18h30…) et réfléchir à des indications de nutrition artificielle. Voilà des solutions pas si compliquée à mettre en oeuvre dans la majorité des cas où la voie entérale est disponible.
J’aime l’aphorisme provocateur qui rappelle que la dénutrition est la principale cause de SIDA. Souvenez-vous en.
(Dans le sens où la dénutrition entraîne une défaillance immunitaire évidemment, aucun lien avec le VIH… mais vous aviez compris…)
Merci pour eux.
Les 7, 8 et 9 décembre s’est tenu un congrès de nutrition important regroupant la Société Française de Nutrition (SFN) et la Société Française de Nutrition Entérale et Parentérale (SFNEP.)
Ce congrès a été très enrichissant. Il a une nouvelle fois démontré que le « soutien institutionnel » de l’industrie agro-alimentaire est omniprésent.
la glutamine
La glutamine a débarqué en nutrition artificielle grâce aux spoutniks. Et oui dans un programme d’optimisation du débit de selles des astronautes, la glutamine a été testée et on bénéficie aujourd’hui de bénéfices collatéraux.
Cet acide aminé est dit conditionnellement essentiel. Du singe savant pour paraphraser le syndrome de Murphy : y’a en plus quand on a besoin ou loi de l’emmerdement maximum (métaphore filée.)
je vous propose en ligne le petit cours que j’avais présenté au DES d’anesthésie-réanimation…
c’est par ici : cours nutrition artificielle
Le sportif recherche la performance.
Tout ce qui peut l’aider à travers son entraînement, sa préparation mentale et son alimentation l’intéresse.
De nombreux sportifs prennent des compléments alimentaires plus ou moins dosés (parfois à des doses infinitésimales avec un but purement marketing comme dans les gels dits « Anti-Oxydant », laissez moi rire) à des prix souvent élevés surtout quand on calcule le ratio prix au mg de vitamine.
On imagine, que l’augmentation de l’activité physique implique une augmentation des besoins en vitamines et en oligo-éléments parce que l’on stresse son organisme.
De plus la dépense énergétique, l’oxydation massive de glucose génère une avalanche de radicaux libres, souvent montrés du doigt dans le vieillissement.
Je pensais ça, je me disais bon ok plein de sport mais damned ça me faire bouffer plus et me vieillir prématurément : je ne suis pas d’accord (je suis un grand angoissé et j’ai plein de trucs à faire donc je rêve d’une longue et active vie 😉 ) comme je vous l’ai écrit ce matin je prends donc régulièrement des compléments. (Les rats nous laissaient déjà suggérer le contraire).
Mais, aujourd’hui, je suis dans la confusion.
Une présentation à un congrès de la société européenne de nutrition entérale et parentérale a changé radicalement ma vision des choses et m’a ouvert à toute une nouvelle littérature en recherche fondamentale et clinique.
Une équipe allemande me donne envie de donner un grand coup de pied dans mes boîtes de gélules (sauf les oméga-3 bien sûr). Ces chercheurs spécialisés dans le vieillissement partent du constat bien expliqué dans la littérature que le sport est bénéfique car il prévient notamment le diabète et la résistance à l’insuline en général. Ceci non seulement en diminuant le surpoids mais en déclenchant des méchanismes spécifiques de sensibilisation à l’insuline.
Un article dans une revue tout ce qu’il y a de plus reconnu et de sérieux me bouleverse.
Ces chercheurs posent l’hypothèse que la sensibilisation à l’insuline (et donc l’effet bénéfique sur la santé) passe par la génération de radicaux libres, et qu’on contraire, un effet ponctuel/transitoire est donc bénéfique pour l’organisme. En donnant des antioxydants, on pourrait bloquer ces bénéfices.
Ainsi ils ont travaillé avec deux groupes de jeunes sujets : des sujets non entraînés (20) et d’autres plus entraînés (20) (6+ heures de sport par semaine, VO2 max moyenne 54 ml/kg). Ces sujets ont soit reçu de la vitamine C (500 mg) et de la vitamine E (400 UI) le matin, soit un placébo. Ils ont ensuite tous été entraînés : sur 4 semaines, 5 jours d’affilée, 20 minutes de vélo ou footing, 45 minutes de tours de pistes et 20 minutes de périodes de transition (échauffement et diminution de cadence à la fin), bref pas de la gnognotte.
Et bien la conclusion est que la prise d’antioxydants diminuent bien les marqueurs du stress oxydants mais aussi et surtout diminue la sensibilité à l’insuline qui est l’un des meilleurs effets bénéfiques de l’activité physique.
Les sagittaires aiment bien faire le grand écart dans leurs idées et comme il parait qu’il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis, je vous donne en scoop ma décision de diminuer certains compléments 😉 Par contre je conserve ma boisson avec mes acides aminés ramifiés 😉
take care.
PS, je vous conseille ce bouquin, il est très intéressant et sérieux (contrairement à ce que laisse suggérer sa couverture)
UPDATE FEV 2013 : ma position a évolué, lire ici
Est-ce que je prends des compléments alimentaires ? Oui. Est-ce que c’est une attitude rationelle ? Je ne sais pas. Est-ce qu’il y a des arguments scientifiques pour ? Un peu. Est-ce qu’il y a des arguments scientifiques contre ? Un peu beaucoup ;-). Il y a-t-il des recommandations médicales de sociétés savantes solides en faveur d’une prise de compléments alimentaires chez l’homme sain ? Clairement non.
EDIT avril 2011, encore une belle cohorte négative avec un résumé des essais dans la discussion : Multivitamin Use and the Risk of Mortality and Cancer Incidence The Multiethnic Cohort Study.
J’ai suivi durant cette année universitaire les cours du DIU de Nutrition Artificielle dirigée par Jacques Delarue et Olivier Goulet. Les cours étaient variés et tous les rappels de physiologie et de pharmaco étaient vraiment très intéressants.
En espérant que Google pointe le bout de son nez un jour par içi, je vous donne les questions que l’on a eu lors de l’examen de juin 2010 :
– Régulation du métabolisme protéique intestinal (cf cours de M Coeffier)
– Lipides en NP : physico-chimie et intérêt clinique
– Fibres alimentaires : nature et intérêt clinique
– Facteurs de gravité somatiques de l’anorexie mentale
Les oméga-3
Les Oméga 3 : une brève introduction
Mais que sont les oméga-3 ? Marketing agro-alimentaire ? Aliments intéressants ?
Je vais essayer de faire une rapide synthèse dans un court billet.
Pour quoi ce nom ésotérique ? Il y a-t-il un alpha et un oméga alimentaire ? Il s’agit d’une dénomination dérivée de la structure biochimique de cette sorte de lipide qui indique qu’il existe une double liaison carbone trois carbones avant la fin de la chaîne structurelle de ce lipide.
Le mot est lâché, les oméga-3 c’est du gras ! Lipide=gras. Le Mac-Carthysme anti-gras-très-méchant-qui-fait-grossir aurait mieux fait de s’occuper des tonnes de sucres que nous ingurgitons (et qui finissent par être transformé et stocké sous forme de gras) plutôt que crier haro sur le bout de gras.
En fait cette famille est constituée de trois lipides dont les noms abrégés (en anglais) sont ALA, DHA et EPA. On trouve l’ALA dans certains végétaux, dans notre alimentation cela se traduit par une présence dans quelques huiles : lin, chanvre, noix et colza sont les exemples à retenir. Il n’y a pas de quantité significativement intéressante dans les margarines et les autres mélanges d’huile de cuisson type ISIO 4.
L’EPA et le DHA se trouvent eux préférentiellement dans les poissons gras aux premiers rangs desquels le maquereau et le hareng. Le saumon en contient également dans de plus faible quantités.
Pourquoi consommer des oméga-3 ? La réponse est simple et récurrente en matière de nutrition : on est constitué de ce que l’on mange, préférez-vous que votre rétine dispose de bons lipides pour se constituer ou vous contentez-vous des restes d’huile de palme qui dégoulinent des frites du MacDo ? Les oméga-3 participent à la construction de nos membranes cellulaires. Notre organisme puise au sein de ces membranes lorsqu’il a besoin de construire des petits messages chimiques à base de lipides. Ces deux notions sont le fondement de l’intérêt de la consommation des oméga-3.
Ainsi, une meilleure qualité de l’enveloppe de nos cellules, les rend plus aptes à faire passer les messages de l’extérieur vers l’intérieur, et aussi à se déformer correctement lorsque la situation le nécessite, les cellules sont ainsi « plus souples ».
Ensuite lorsque l’organisme pioche dans les membranes pour trouver ces petits messagers lipidiques, on sait que le message sera un peu différent s’il provient d’oméga-3. Les molécules ont ainsi des propriétés plutôt anti-inflammatoires. Ce phénomène est évidemment intéressant dans toutes les maladies chroniques où trop d’inflammation grignote petit à petit l’organisme.
Quelles quantités d’oméga-3 ? Les oméga-3 les plus intéressants pour nous sont l’EPA et le DHA. De plus l’organisme ne peut pas transformer correctement l’ALA en EPA et DHA. Donc haro sur les poissons gras ! Du poisson gras deux fois par semaine (youpi encore une excuse pour décompenser chez Sushi Shop !!), et utiliser préférentiellement l’huile de noix dans quelques vinaigrette apportera plus d’oméga 3 dans votre alimentation. J’ai aussi personnellement choisi l’huile « Fleur de colza » de Lesieur pour la cuisson, elle est moins chère que les huiles classiques et apporte plus d’oméga-3.
PS, quelques indices pour vos lectures en anglais : flax/lin seed = graines de lin, canola=colza, soy=soja
Bon appétit !
Update le 26 février 2011, une étude épidémiologique sur le lien entre les oméga 3 et la longueur des télomères de patients coronariens. Association of Marine Omega-3 Fatty Acid Levels With Telomeric Aging in Patients With Coronary Heart Disease
Ramin Farzaneh-Far, MD; Jue Lin, PhD; Elissa S. Epel, PhD; William S. Harris, PhD; Elizabeth H. Blackburn, PhD; Mary A. Whooley, MD
JAMA. 2010;303(3):250-257.
Edit avril 2011 : Une belle étude sur la prévention de la dégénérescence maculaire liée à l’âge http://goo.gl/a2qP0