In my department we do around 40-50 free flap surgeries for ENT cancer per year. Here is the usual process
Catégorie : médecine
L’un de mes principes forts c’est de savoir pourquoi on donne un traitement à un patient. (L’autre dada c’est de travailler à bien donner le traitement.) Ainsi je travaille depuis un moment à limiter l’oxygénothérapie inutile.
Aujourd’hui, je passe le clavier à Minh, qui avec son style et des nouvelles publications que je ne connaissais pas (recos BTS) renforce le message. Je lui passe le clavier.
Hi !
Yesterday I was attending as an anesthesiologist for a very old lady having a very long surgery. ENT surgery for cancer with a brachial freel flap reconstruction. I have to say that I do not know nothing about this medical litterature but I write this as quick memo for later. There also some tidbits about scarring.
- what about giving aspirin one week before the surgery ? does the risk of more transfusion outweights the benefits ?
- what about giving NO donors before the surgery or at least NO rich food like beetroot concentrate ?
- what about aiming for an hematocrit between 27 and 30 % for good hemorheology ?
- what about maintaining a good mean arterial pressure and keeping a very shallow window of 60-70 mmHg ?
- is there a place for intravenous isorbide dinitrate during surgery ?
- is there a place for rinsing the flap with heparinized solution and or nitrates ?
- should we use more albumin or fresh frozen plasma to preserve glycocalyx of the microcirculation in the flap ?
- in the post-operative ward, might photobiomodulation with red or more seriously infrared lights help tissue metabolism ?
- should we encourage even more patients to move after the surgery to rise cardiac output ?
- is there a place for zinc and ascorbic acid supplementation or proline to enhance collagen production ?
Cet article a été déplacé sur mon blog substack (1) L’allergie à la pénicilline – by nfkb – hic & nunc (substack.com)
J’ai lu en lendemain de garde le livre du Dr Philippe Eveillard intitulé « Le dopage est-il un mirage » en auto-édition, vendu sur Amazon. L’auteur en avait parlé dans les commentaires d’un court billet que j’avais fait en lien avec l’affaire de « La saignée » en Autriche et en Allemagne. Je l’ai lu d’une traite en lendemain de garde. Le sujet m’intéresse et l’écriture est fluide ce qui a rendu possible la lecture dans ce contexte. Je vous mets au défi de lire un truc mal écrit de plus de 140 caractères à 10h du matin en ayant passé la nuit à l’hôpital. Le Dr Eveillard, place en quatrième de couverture une biographie pour le moins laconique : « Docteur en Médecine. Ancien médecin de l’équipe de France de cyclisme sur piste 1984-1990. » Pas de CV à-la-Linkedelik !
Lors d’une garde récente, j’ai eu une discussion très intéressante avec mon collègue adoré G. La conversation portait sur l’utilisation de la noradrénaline diluée, les pour, les contres, etc. Mes commentaires a posteriori du billet original restent valables mais je tiens quand même à en reparler parce que je pense que le sujet est très important.
Depuis la publication fin 2017 du billet sur la noradrénaline diluée en anesthésie, j’en ai vraiment beaucoup fait. Avec un peu plus de recul, je peux vous apporter un peu plus d’éléments pratiques. je rappelle qu’en anesthésie-réanimation on parle souvent de « gammas » pour parler de microgrammes (µg)
J’ai eu la chance d’être formé dans des services qui ont une longue histoire de soins de patients avec des pathologies oesophagiennes et gastriques. J’ai lu avec attention le RETEX d’inhalation pour une FOGD dans la newsletter #10 de l’Anesthesia safety Network. Les patients qui ont une achalasie de l’oesophage sont probablement parmi les plus à risque d’inhalation. Il y a d’autres situations similaires comme les patients ayant eu une oesophagectomie avec gastroplastie intrathoracique, le patient souffrant d’une occlusion intestinale aigüe haute ou encore d’une épistaxis avec beaucoup de sang ingéré. Bref, vous connaissez les situations.
Avec l’expérience, nous avons mis en place des stratégies complémentaires pour limiter le risque d’inhalation. Je vous propose d’y réfléchir en équipe chez vous :
- Regarder l’imagerie ou en parler avec le chirurgien quant à une éventuelle dilatation gastrique ou intestinale (corollaire : se former à l’échographie pour évaluer le pylore)
- erythromycine, 250 mg IV en prémédication
- SNG en aspiration à – 20 cmH20 avant d’arriver au bloc (attention à la distance à la narine si achalasie ou gastroplastie, plutôt 40 cm que les 60 cm habituels)
- distribuer des rôles si régurgitation, nommer la personne qui bascule la table d’opération
- induction plus profonde que d’habitude avec anticipation de la dégradation hémodynamique en utilisant un vasopresseur dès l’induction. J’utilise personnellement de la noradrénaline très diluée (16 gammas/ml) entre 20 et 40 ml/h (0,3 à 0,6 mg/h) pendant l’induction
- certains évoquent l’idée d’intuber en premier dans l’oesophage avec une grosse sonde pour diriger le vomissement à l’extérieur de la bouche du patient, à discuter
- canule d’aspiration chirurgicale (type Yankauer) en aspiration dans l’oropharynx dès la laryngoscopie, à coincer sur le côté gauche du laryngoscope
Ce même billet a été publié dans la newsletter #11 de l’ASN. Lisez les et soutenez le travail du Dr Frédéric Martin, ça vaut la peine.
Hello,
on me demande souvent ce qu’il faut faire face aux crampes. J’ai toujours la même réponse : s’entraîner pour être plus fort ou ralentir ! Il y a très peu de raisons médicales.
Je vous colle un dernier échange de SMS sur le sujet.
Hier soir, je feuilletais le « vieux » Lore of Running de Tim Noakes. Une somme sur la course à pied, et pourtant le chapitre sur les crampes est tout petit. Voici la page sur le sujet :
Je viens de terminer le livre « Pourquoi nous dormons » de Matthew Walker. J’ai adoré ce bouquin, je pense qu’il trouve son succès dans le bon mélange de vulgarisation et d’explications scientifiques. Je suis vigilant quant à la quantité et la qualité de mon sommeil. J’ai compris au fil des années que c’était vraiment la pierre angulaire de la santé. Sans une bonne nuit de sommeil, l’activité physique est moins bénéfique et nos choix nutritionnels peuvent se dérégler. Alors même qu’on met beaucoup aujourd’hui l’accent (à raison) sur les bénéfices de l’activité physique et d’une alimentation de qualité, on néglige encore le sommeil qui devrait être aux prémices de toute discussion sanitaire. Malheureusement, le sommeil n’est pas valorisé à sa juste valeur. Un petit dormeur va être mieux vu qu’un gros dormeur, on va caricaturer le premier en bosseur et le deuxième en fainéant. Alors qu’il est si délétère d’avoir peu de sommeil et si bénéfique d’aller chercher les 7,5-8h recommandés. Il y a là toute une réflexion sociétale qui constitue la dernière partie du bouquin et ça m’a particulièrement intéressé étant de plus en plus soucieux des facteurs humains dans le bloc opératoire (et aussi de plus en plus fragile face aux gardes !)
Le sport m’a appris à accorder de l’importance à mon sommeil (alors même que la petite histoire du guerrier qui se lève tôt parle tant à mon esprit…) et ce livre a resouligné l’importance du manque de sommeil dans la genèse des maladies. Ainsi, je pense que je n’ai pas reçu assez de cours sur la nature du sommeil et ses dérèglements lors de mes études de médecines. Je peux même dire que je ne me souviens absolument pas qu’on m’ait expliqué ce qu’était le sommeil et une insomnie, alors pourquoi est-ce que je me souviens de l’acidose tubulaire de type IV ? (J’ai vu qu’aujourd’hui c’était plus clairement inscrit au programme de l’examen classant national). Ainsi, je me demande quelle proportion de patients mériteraient qu’on s’intéresse de plus près à leur sommeil. Peut-être est-ce là encore une forme de médicalisation de problèmes de société mais quand je vois l’utilité du sommeil dans tant de fonctions vitales (comme l’immunité) et les conséquences si violentes de la fatigue chronique comme les accidents de voiture, je pense qu’il y a vraiment quelque chose à développer pour améliorer nos vies.
Ainsi ce livre donne des explications claires sur la nature du sommeil et les rythmes circadiens, les liens entre maladies et manque de sommeil, les rêves et l’organisation de notre monde qui les dégrade… Je trouve que c’est vraiment une saine lecture pour soi et puis pour ceux qui nous sont chers.
Et pour finir, je me sens un peu couillon en le faisant mais je ne résiste pas aux conseils usuels pour améliorer la qualité de son sommeil.
- Se coucher et se lever aux mêmes heures tous les jours. Essayer de rattraper du sommeil le week-end est une illusion et complique nos rythmes biologiques
- Dormir dans une pièce fraîche, une température entre 17 et 18°C est classiquement recommandée
- Limiter la lumière le soir, éteignez les lumières des pièces où vous n’êtes pas, réfléchissez à des lumières tamisées, méfiez vous des LED et notamment celles des écrans qui émettent beaucoup de lumière bleue qui gêne la montée de la mélatonine en soirée
- Ne restez pas au lit si vous ne vous endormez pas rapidement, levez vous, allez lire un livre dans une autre pièce et revenez vous coucher quand la somnolence apparait
- Limitez les excitants, si le sommeil est une priorité pour vous, testez la suppression de l’alcool et de la caféine (et la nicotine). Ou a minima, ne consommez pas de café ou d’alcool passé une certaine heure de la journée. Même si vous arrivez à vous endormir en prenant un café en soirée, il est démontré que la qualité du sommeil est moindre. Notez aussi qu’il est malin de limiter la prise de liquide passé une certaine heure pour limiter l’envie d’aller uriner pendant la nuit
- Exposez vous à la lumière matinale le matin, sachez vous passer de lunettes de soleil pendant 20-30 minutes le matin dehors si c’est possible pour vous
- L’activité physique lorsqu’elle est suffisamment à distance du coucher améliore le sommeil
- Un bain chaud en soirée, en vasodilatant les vaisseaux cutanés, vous aidera à perdre un peu de chaleur et facilitera votre endormissement
- Evitez les siestes après 15 heures
WeAre2018
J’ai pris un abonnement à You Tube Premium. Je sais, ça n’est pas du tout Jocko friendly. Toujours est-il que je me retrouve à glander en lendemain de garde à voir ce que me propose YT. Comme j’ai regardé la vidéo des collègues blogueurs de Blockchoc (branding presque aussi foireux que nfkb0.com non ?) et du gazier.com You Tube me propose d’autres vidéos du congrès WeAre2018. J’avoue qu’après un passé étudiant de syndicalisme appuyé je me sens très loin des organisations comme l’AJAR et les congrès français que j’ai faits m’ont très déçu par leur conformisme et les marronniers défraîchis (#tautologie). Et bien là je suis vraiment séduit et ces vidéos ont été excellentes pour accompagner une séance de home-trainer à la cool.
Je vous conseille particulièrement ces deux là, la première parce que le sujet me tient à coeur +++ et ça fait du bien d’entendre quelqu’un dire ce que je pense mieux que moi (j’ajouterais volontiers des notions de leadership et d’exemplarité à ce topo). La deuxième parce que malgré les difficultés quotidiennes il faut bien renforcer et constater la puissance et la beauté de notre métier, merci pour ça !
Je me sens naze de ne pas avoir l’énergie, la motivation, l’envie de participer à la croissance de ma spécialité comme le font les anesthésistes-réas de l’AJAR. Ça faisait un moment que l’idée d’un congrès de ce type me trotter en tête, j’en avais un peu parlé avec certains twittos… l’AJAR l’a fait, bravo à eux. Il va peut-être falloir que je réfléchisse à sortir de ma caverne.
Le thème coeur et sport me fascine par l’interrogation entre le normal et le pathologique ainsi que la complexité inhérente à l’étude de situations rares.
Le principal noeud gordien de mes questions est la possibilité que l’activité physique intense et régulière puisse être délétère pour la santé. Mes premiers billets sur le sujet ont été déclenchés par la première étude que j’avais lue à ce sujet qui étudiait l’épaisseur intima-média de la carotide interne de coureurs de marathon vis à vis de leur conjoint. Une lecture en amenant une autre, j’avais découvert le cardiologue James O’Keefe qui pense que l’activité physique peut accélérer l’athérosclérose (sa dernière revue sur le sujet est ici ), la Copenhagen City Heart Study , etc. J’ai été impressionné par ce concept, et ça m’a pas mal travaillé. Aujourd’hui, après beaucoup plus de lectures, je trouve qu’il n’a vraiment pas assez de données pour avancer ça et je trouve son wording embarrassant et anxiogène. Je suis un peu empêtré dans mon biais de confirmation mais quand même je ne comprends pas vraiment ce qui l’a alerté au point d’écrire et de causer autant sur le sujet (ni pourquoi il a eu autant le micro pour raconter ses idées).
Lorsque je réfléchis au thème coeur et sport, je vois surtout deux grands tableaux se dessiner : le dépistage des contre-indications à une activité sportive intense et la compréhension des conséquences physiologiques d’un entraînement important avec au paroxysme les spécificités des sportifs professionnels.
La partie dépistage comprend une part politique et sociétal pour décider à qui incombe le coût des examens et la stratégie de dépistage se décide au niveau étatique et fédéral. Récemment, les certificats d’aptitude au sport ont été revus en France avec une validité du certificat médical portée à 3 ans pour la plupart des sports sous réserve d’un auto-questionnaire favorable. Ce qui est particulièrement compliqué à propos du dépistage c’est la compréhension par le public de l’efficacité de ce dernier et des limites à multiplier les examens.
Tout examen médical que ça soit une auscultation, une prise de sang ou un examen d’imagerie a des caractéristiques qui leur sont propres dans une population donnée. Un examen a une capacité à trouver la maladie si elle est présente et une capacité à écarter une maladie si elle est absente . Et aucun examen affirme à 100% une pathologie si elle présente et aucun examen ne peut vous garantir à 100% que vous n’avez pas une pathologie. Ainsi, avoir un électrocardiogramme normal n’écarte pas à 100% un problème cardiaque. Rassurez vous, on peut quand même se fier aux examens complémentaires pour réfléchir, simplement il faut en connaître leurs limites et c’est l’un des rôles du médecin. Ensuite, l’examen couplé à vos antécédents (personnels et familiaux), votre interrogatoire et votre examen clinique devient encore plus pertinent. C’est pour ça qu’il est couillon d’envisager que l’on puisse consommer des examens de santé sans prescription et encadrement médical. Là où ça devient vraiment compliqué c’est lorsqu’un examen apporte un signe anormal sans qu’on puisse être formel sur le diagnostic, le raisonnement médical pousse alors souvent à faire d’autres examens pour mieux cerner ce signal. Parfois, certains examens sont invasifs et ont des conséquences sur la santé. Par exemple, piquer dans une artère pour aller regarder les artères du coeur avec un produit de contraste expose au risque d’allergie au produit de contraste ou d’hématome au point de ponction, vous voyez l’idée. En plus, ces examens plus complexes ne seront pas forcément rentables vu la rareté des pathologies recherchés. La problématique du dépistage est donc vraiment compliquée et il faut accepter l’idée qu’un dépistage s’envisage dans le cadre d’une population globale. Pour trouver des maladies rares c’est très compliqué d’organiser un dépistage. La mort subite du sportif a une incidence très faible entre 1/4000 (dans une étude sur des basketteurs US en milieu universitaire) à moins de 1/100 000, ainsi le dépistage a peu de chance d’être efficace et les données actuelles de la science vont dans le sens de l’absence d’un dépistage efficace face à la mort subite du sportif. A titre d’exemple, Florian Zores m’a rappelé l’existence d’une étude parue cet été sur le dépistage de footballeurs anglais . Larry Creswell a fait un chouette billet de blog sur le sujet. On touche du doigt ici la difficulté du dépistage puisqu’il y a eu 8 morts dans cette cohorte de 11168 footballeurs. Parmi eux, 5 ont eu des examens déclarés normaux lors du dépistage et 2 ont eu un dépistage positif et ont continué le sport.
Ainsi, en France, il n’y a pas lieu de réaliser des examens complémentaires en première intention (cf ce site) . La place de l’épreuve d’effort n’est pas claire chez le sujet sain et je pense personnellement qu’il y a un abus de prescriptions de ce genre d’examen par les cardiologues et/ou une demande trop forte de la part des sportifs et de leur médecin traitant. Dans les recommandations, on peut lire des choses un peu sioux du style « à envisager en cas de reprise d’une activité sportive chez l’homme de plus de 40 ans »… je ne m’étendrai pas plus sur le sujet mais je pense qu’il y a matière à réduire des coûts de santé dans notre pays. (Et comme l’explique Florian Zores dans son tweet, les recommandations de la Haute Autorité de Santé sont difficiles à lire.)
Le document HAS sur l'activité physique est imbuvable.
Renvois systématiques aux pages précédentes ou suivantes, flowchart sans applicabilité évidente, pas de synthèse.
La partie sur la motivation (p64) est pas mal cependant
Et un rappel intéressant pour les épreuves d'efforts pic.twitter.com/tgww012N75— Florian Zores (@FZores) December 9, 2018
En conclusion, il n’y a pas de preuve qu’un dépistage organisé diminue la mortalité des sportifs pendant l’effort. C’est pas facile à comprendre de prime abord mais le risque de multiplier des examens est probablement plus délétère (ex en dépistant des WPW qui vont avoir des traitements endovasculaires) que la chance de sauver quelqu’un. C’est pourquoi il n’y a pas d’examen complémentaire systématique à faire en France avant d’envisager de pratiquer du sport en compétition pour une personne lambda. S’il s’agit d’une personne ayant déjà des soucis de santé précis, alors on sort du cadre du dépistage de masse. Encore une fois en médecine, je pense que la priorité est au dialogue avec le patient pour expliquer, rassurer et donner des consignes en cas de difficultés. Un examen complémentaire OK n’est pas un feu vert absolu. Il faut louvoyer, s’adapter, individualiser les décisions.
A propos des conséquences d’une activité sportive d’endurance, commençons par une chose grave : la mort. Quelles sont les données sur la mortalité liée aux sports d’endurance ? Il est difficile d’avoir des chiffres très précis mais j’ai estimé en croisant les lectures que dans la population générale la mortalité d’origine cardiaque du fait du sport ) serait à moins de 1/100 000 habitants par an (0,4/100000 coureurs dans un registre parisien récent ). Il y a entre 500 et 1000 personnes par an qui meurent subitement en faisant une activité sportive en France. Pour mettre ça en perspective, la mortalité par accident de voiture en France est de 7,8/100 000 (un mort toutes les 3h) et la mortalité par suicide (1ère cause de mortalité entre 30 et 39 ans) est de 21 pour 100 000 (plus d’un mort par heure sur le territoire national !) .
Il y a de multiples preuves que l’activité physique a un effet bénéfique sur bons nombres de facteurs de risques : amélioration du bilan lipidique, baisse de la pression artérielle, augmentation de la sensibilité à l’insuline, amélioration de l’humeur. Alors la question numéro un qui subsiste c’est pourquoi il y a une augmentation du risque de mourir subitement dès lors qu’on fait un effort ?
La première raison est l’existence de pathologies cardiaques sévères n’ayant pas été dépistées auparavant, certaines rares pathologies s’expriment plus lors de l’activité physique comme la dysplasie arythmogène du ventricule droit (DAVD) ce qui peut expliquer leur découverte à l’occasion d’un évènement grave. L’autre grande pathologie pourvoyeuse de mort subite est la cardiomyopathie hypertrophique génétique (CMH). Après 35 ans, c’est la pathologie coronarienne (infarctus du myocarde) qui est largement en tête des étiologies.
Ensuite, bon nombre de sportifs ont démarré une activité sportive tardivement, utilisant le sport comme un moyen de contrecarrer d’éventuels problèmes sanitaires (lutte contre le tabagisme et la sédentarité, amélioration de la sensibilité à l’insuline, etc). L’athérosclérose étant un processus plutôt long, démarrant dès l’enfance, il est tout à fait logique qu’un sportif d’âge mûr se lançant sur de longues distances à pied puissent le faire en étant porteur de lésions coronariennes asymptomatiques qui pourront se décompenser pendant un effort intense. D’ailleurs dans les cohortes 1 Million Women Study , la cohorte danoise ou dans l’étude de Möhlenkamp sur les marathoniens , cette limite est souvent évoqué : le sportif commencerait ses entraînements alors qu’il est déjà porteur de lésions coronariennes (beaucoup de fumeurs ou ex-fumeurs dans ces cohortes, de facto à très haut risque), dès lors ça n’est pas particulièrement le sport qui accélérerait la physiopathologie mais le sport catalyserait la découverte en augmentant la demande myocardique en oxygène.
Cette explication ne satisfait tout le monde puisque des auteurs ont trouvé que des sujet pratiquants les sports d’endurance peuvent avoir un CAC score plus élevé que des sujets appariés sur l’âge et les facteurs de risque n’ayant pas la même activité sportive . Le score CAC résulte d’un examen qui étudie via un scanner (examen de radiologie) la quantité de calcifications dans le réseau des artères coronaires. Classiquement un CAC score élevé traduit plus de calcifications et donc potentiellement un processus athérosclérotique plus avancé . Mais cette affirmation a ses limites. Ainsi, toutes les plaques d’athérosclérose ne sont pas égales entre elles, et certaines plus fragiles seraient plus à même de se rompre et de causer un infarctus du myocarde. Chez le sportif, les plaques, lorsqu’elles sont trouvées par le scanner des coronaires, seraient plutôt des plaques stables, consolidées par des dépôts calciques. D’ailleurs, les statines sont connues pour avoir un effet stabilisant de plaque passant une calcification accrue de celles-ci. En plus, la course à pied est connue pour augmenter la sécrétion de parathormone (PTH), hormone contribuant à augmenter le taux de calcium sanguin. Ainsi, il se pourrait qu’il existe une plus grande disponibilité du calcium chez les coureurs, avec pour lien plus de calcifications sur les vaisseaux. Ensuite, même avec un CAC score élevé, si le sportif est capable de faire plus de 10 MET d’effort (soit courir au point d’être essoufflé, à peu près autour de l’allure marathon) le pronostic est très bon comparé à ceux qui n’en sont pas capables . BD Levine, un cardiologue connu pour avoir plusieurs fois commenté ce sujet pense qu’il n’y a pas de pronostic différent chez les coureurs réguliers ayant un CAC élevé et il devrait utiliser prochainement les données de la cohorte Cooper Clinic Longitudinal Study pour corroborer ses propos (communication personnelle < ça fait chic hein).
On peut lire à peu près les mêmes débats à propos des rehaussements tardifs (LGE en anglais) retrouvés chez certains sportifs asymptomatiques sur des IRM cardiaques . On ne connait pas aujourd’hui le pronostic des porteurs de ces images : idem ou moins bon ? nous sommes en attente de travaux prospectifs plus lourds. On ne sait pas quoi faire de ces images et on ne peut pas leur associer un pronostic particulier. Il y a simplement un drapeau orange qui se lève si la topographie des lésions est compatible avec une pathologie coronarienne auquel cas il conviendrait vraisemblablement de pousser les explorations pour objectiver une coronaropathie à risque de décompensation. Et, chez des sportifs de haut niveau/professionnels ayant eu des anomalies sur l’ECG et ou des troubles du rythme, les rehaussements tardifs seraient là carrément un drapeau rouge .
La deuxième question qui vient après la possibilité de mourir subitement pendant un effort est la possibilité de développer des pathologies cardiaques chroniques à cause d’une activité sportive d’endurance. Le principal problème serait la genèse d’arythmies. Il convient alors de distinguer les troubles du rythme « bénins » et les troubles du rythme graves, mortels en quelques minutes (on se rapproche alors du sujet de la mort subite).
Il paraît aujourd’hui bien établi que les sportifs pratiquant longtemps une activité d’endurance poussée sont plus à risque de faire de la fibrillation auriculaire. J’ai écrit un billet à ce sujet. Ce trouble du rythme est ennuyeux mais il n’obère pas le pronostic vital à court terme.
Ensuite, il existe quelques très exceptionnels cas de sportifs développant des troubles du rythmes graves à type de tachycardie ventriculaire. Pour le cardiologue spécialisé André La Gerche, il pourrait exister un spectre de pathologies ressemblant à la DAVD sans en avoir le substratum génétique chez des sportifs très avancés (15 à 40h de sport hebdomadaire). Il rapporte le cas d’un cycliste professionnel dont les adaptations cardiaques dépassaient le cadre du coeur d’athlète selon son équipe. Ce sportif d’abord rassuré par d’autres cardiologues a ensuite été conseillé par l’équipe de La Gerche d’arrêter le sport professionnel. Malheureusement le patient pour qui le sport est toute sa vie, y compris son gagne-pain voit son monde s’effondrer à l’occasion d’une telle annonce… il a décidé de poursuivre et il est décédé à l’entraînement. Il y a probablement une poignée d’athlètes concernés par ce genre de problème sur la planète. Mais il reste très violent et difficile de comprendre que des athlètes si bien suivis et conseillés puissent encore mourir devant les caméras comme le pauvre Michael Goolaerts lors de Paris-Roubaix 2018. Notez au passage que les produits dopants sont difficile à impliquer dans ce genre de drame. D’une part parce que les produits connus sont peu pourvoyeurs d’arythmies graves, ensuite vu la probable forte consommation de produits dopants dans le sport de haut niveau, j’imagine qu’il y aurait plus d’accidents si ces derniers étaient fortement toxiques pour le coeur.
Tout ceci marque les esprits et il faut faire attention aux biais cognitifs. L’athlète est le stéréotype du sujet du sain à nos yeux, le fait que dans de très exceptionnels conditions ils puissent souffrir d’une maladaptation à un entraînement poussé existe malgré tout. Chez des pratiquants moins avancés, je répète que le sport bien qu’excellent pour la santé n’immunise pas contre des pathologies comme l’athérosclérose. Cette dernière progresse sur des dizaines années avec une physiopathologie complexe que le sport ne peut enrayer.
Pour rassurer le public pratiquant des sports à des volumes élevés, BD Levine montre dans la controverse de Circulation de 2014 que les sujets âgés qui ont pratiqué sur le long terme des sports d’endurance ont une compliance cardio-vasculaire comparable à des sujets plus jeunes de plusieurs années. Il y a même des données sur des sujets de 70 ans qui ont une « souplesse » de leur coeur et de leur aorte comparable à des sujets de 40 ans ! Et de plusieurs cohortes de sportifs de haut niveau montrent une survie améliorée par rapport à leurs concitoyens (avec plusieurs biais, mais tout de même si le sport intense tuait largement, il y aurait une hécatombe parmi les olympiens)
Les sports d’endurance restent un excellent moyen d’entretenir sa santé, faites du sport si vous aimez ça ! Quelques conseils pour augmenter votre sécurité :
- écoutez vos symptômes
- sachez vous reposer régulièrement (de l’importance du sommeil +++)
- consultez au moindre doute
- formez vous aux premiers secours, parlez en autour de vous et révisez régulièrement (une bonne résolution pour 2019 ?)
- pratiquez en groupe
- pour un grand défi choisissez une grande course médicalisée
- Vous pouvez également discuter avec votre médecin traitant d’une éventuelle prise d’aspirine avant une grande compétition (semi-marathon, marathon) si vous êtes un homme de plus 40 ans .
Si vous êtes intéressé par le sujet, je vous invite à lire la controverse dans Circulation de 2014 : Can too much exercice harm the heart ? avec un tableau pour édité par l’équipe d’André La Gerche et un tableau contre rédigé par BD Levine et les lettres en rapport . L’autre superbe revue est de l’équipe hollandaise d’Eijsvogels , je vous la conseille vivement.
UPDATE MARS 2020 : Déclaration de l’AHA sur les conséquences cardio-vasculaires de l’activité physique.
UPDATE AVRIL 2020 : un bon article résumant la problématique sport et athérosclérose
« Le cholestérol »
Le sujet cristallise beaucoup d’excès. Excès de prescriptions de biologie, excès de traitements en prévention primaire, excès de story-telling chez les détracteurs , excès de story-telling chez les médecins au départ.
Par contre, je ne pense pas qu’il y ait un excès de réflexion et de compréhension autour du sujet si complexe du « cholestérol » comme facteur de risque cardio-vasculaire et comme rouage dans la physiopathologie de l’athérosclérose.
Mais que vient faire un billet de blog d’un anesthésiste dans le bazar ? comment ne pas ajouter de bruit au bruit ? Mon intérêt pour le sujet étonne plus d’un et je me souviens d’un confrère MG qui m’a fait des yeux ronds lorsque je discutais du sujet à table : « mais qu’est-ce que t’en as à faire toi du cholestérol ? ».
L’accumulation des articles sur la différence entre hypnotique intraveineux (propofol) ou inhalé (halogéné) ces dernières années me turlupine. Il semble que le propofol soit protecteur lors d’une chirurgie pour cancer. Les patients vivraient plus vieux, avec moins de localisations secondaires.On ne peut pas être anesthésiste, s’occuper de patients avec un cancer et ne pas lire l’article de Nature Reviews de Hiller.
Fin octobre, je me suis amusé à faire ce que j’appelle un mini jeune. Il s’agissait de me restreindre fortement pendant 5 jours. 1000 kcal le premier jour puis 700 kcal les 4 suivants. La principale caractéristique est donc une restriction calorique brève. La deuxième caractéristique est de quasiment éliminer les apports en acides aminés. Le tableau des aliments :
Suite de mes réflexions sur le fer en périopératoire. Les choses se décantent et sont plus claires dans ma tête. Ce qui m’intéresse ce sont les patients qui bénéficient d’une chirurgie pour un cancer. Dans ce contexte, nous avons souvent peu de temps entre la consultation et l’opération et il y a souvent une petite inflammation latente.
J’ai le sentiment que le fer injectable est de plus en plus poussé sur le devant de la scène par l’industrie pharmaceutique, Vifor Pharma en particulier. Cette entreprise suisse possède les marques Venofer et Ferinject. Depuis que le fer-saccharose (Venofer) est « génériqué », le carboxymaltose ferrique est poussé sur le devant de la scène.
Le sujet m’intéresse car je trouve que le transport de l’oxygène est un sujet sacrément important en médecine et la culture locale de mon hôpital est forte sur ce sujet avec historiquement un leader d’opinion fort sur la SvO2 et le rapport DO2/VO2. En tout cas, j’ai été élevé dans ce contexte. Néanmoins, le temps passe, la SvcO2 ne tient pas tant que ça ses promesses et/ou le sujet est un peu en disgrâce… (C’était pourtant intéressant d’envisager de transfuser selon le terrain, l’hémoglobine et la SvO2, coucou Ziko ! ).
Par ailleurs, j’ai toujours l’impression de donner mon propre sang lorsque je rédige une prescription de culot globulaire (note : j’avais écrit au pluriel au premier jet), surtout dans un contexte stable, en post-opératoire, je suis toujours dubitatif quant au rapport bénéfice/risque et un tweet m’a beaucoup marqué, je pense que c’était @boiteasavon qui disait qu’une transfusion c’était une (mini) greffe !
La fibrillation auriculaire (FA) est un trouble du rythme cardiaque. Le cœur ne se contracte plus régulièrement ce qui peut engendrer des symptômes immédiats (désagréables mais bénins) ou des complications à plus long terme (plus ennuyeuses).
J’ai découvert sur Twitter le podcast « La 25ème heure de garde ». Je ne peux qu’avoir de la sympathie pour des collègues qui, comme moi, choisissent un branding qui les rendent furtifs 😀
Le podcast traite d’anesthésie-réanimation sur un ton détendu. Les sujets sont intéressants. J’aurais bien aimé qu’ils creusent un peu plus, c’est trop court pour un footing ! (j’attendais la contre-attaque des jeunes avec l’article de Guidet sur le sujet âgé en réanimation ; et on veut des détails techniques ! pour ou contre la kétamine chez le sujet âgé ?)
Je vais désormais prier chaque jour pour que les sympathiques collègues de la capitale invite @Fluidloading pour refaire le monde (oui on peut faire un truc bien à distance, Jogging Bonito le prouve 🙂
update au lendemain de l’écriture de cette note, j’avais uniquement écouté l’épisode sur les sujets âgés au bloc au moment de l’écriture de cette note. Les autres épisodes se terminent aussi par des canulars téléphoniques. Ceux ci sont d’un humour facilement critiquable, moins ma tasse de thé que le reste du podcast. Mon caractère carabin est peut être anesthésié par mon habitude des propos policés sur les réseaux sociaux.
Un informateur anonyme de qualité m’a gentiment envoyé une lecture très intéressante sur la mitochondrie et le stress. Petit a parte, le partage de lectures longues et intéressantes est une des choses qui rend les réseaux sociaux si intéressants. La curation des autres qui vous poussent des articles en connaissant vos sensibilités est meilleure que les algorithmes des GAFA. J’essaye de maîtriser mes partages car je sais aussi la spirale de lectures que ça peut engendrer. J’aime l’idée d’essayer d’ajouter du signal dans le bruit ambiant. en tout cas là, c’est un article que j’ai lu (et relu, parce qu’il est un peu velu quand même)
Il s’agit de cette revue de M. Picard, psychiatre visiblement très intéressé par la recherche fondamentale.
L’article commence par une citation d’Hahnemann sur l’énergie vitale mais cette petite provocation passée, ça m’a bien plu.