Une note rapide pour répondre à la question de Didier le Rouge 🙂 Pourquoi la kétamine a-t-elle traîné cette réputation de favoriser l’épilepsie ? Une première explication pifométrique de ma part est que l’état dissociatif qu’elle engendre peut faire penser à certaines crises partielles et le raccourci est vite fait. Ensuite, beaucoup de travaux fondamentaux, sur le chat notamment, ont montré dans les années 1970 un abaissement du seuil épileptogène avec des EEG pathologiques.
Catégorie : anesthésie-réanimation
Billets ayant attrait à l’anesthésie-réanimation. Pédagogie. Pharmaco. Monitorage.
Et voilà la magie de l’anesthésie en ORL… On fait tous les jours des gestes sur les cordes vocales et puis un jour ça part en cacahuète. A travers l’écriture à froid (enfin, à tiède) de ce billet je pense à plein de choses :
Cannot ventilate
Je trouve que l’on prescrit trop de tramadol en médecine péri-opératoire. Je ne suis pas séduit par le profil bénéfice/risque de ce médicament. Jean-Marie Vailloud m’a rappelé que l’ANSM avait édité un document intéressant sur les interactions médicamenteuses, je vous copie-colle la section sur le tramadol :
Un jour un de mes maîtres m’a expliqué à quel point un visiteur médical a dérapé dans son vocabulaire. Il avait employé le terme « sophistiqué » pour décrire une nouvelle machine d’anesthésie. Même mieux, c’était la machine « la plus sophistiquée »… J’ai alors eu le droit a un cours express sur l’étymologie du terme et sur la problématique de la technologie poussée à son paroxysme. La multiplication des fonctions est vraiment rédhibitoire pour fournir des soins de qualités de façon récurrente sur de nombreuses années. En gros le gadget tue la fonction, c’est bien connu et « sophistiqué » résume bien ça.
Le glandouillage sur le web m’a amené aujourd’hui vers cette vidéo TED qui présente une machine d’anesthésie utile en contexte humanitaire.
Récemment dans le service d’ORL on a décidé de mener une enquête de prévalence des nausées vomissements post-opératoires (NVPO) après chirurgie naso-sinusienne.
La kétamine
La kétamine est ma molécule anesthésique favorite. A la fois molécule sérieuse et mystérieuse elle connait un franc regain d’intérêt depuis la prise en compte de l’hyperalgésie post-opératoire.
La kétamine peut s’administrer sous plusieurs formes : IV, IM, po ou IR sont les voies les plus communes. Après une administration IV elle se fixe très rapidement sur ses récepteurs notamment au niveau cérébral. Son volume de distribution est élevée, elle est peu liée aux protéines plasmatiques. Le métabolisme est très majoritairement hépatique. L’insuffisance rénale avancée augmente tout de même la concentration plasmatique de l’ordre de 20%. La molécule n’est pas épurée en dialyse. La demi-vie de la molécule est de 2 à 3 heures. Il faut noter que la kétamine est rapidement métabolisée en nor-kétamine, métabolite actif qui sera éliminé beaucoup plus lentement pouvant participer aux bénéfices analgésiques ou aux inconvénients psycho-dysleptiques.
Pour écrire la note sur hypokaliémie et magnésium j’ai ouvert deux livres-symboles de ma bibliothèque : « Physiologie rénale et désordres hydroélectrolytiques » et « Clinical Physiology of Acid-Base and Electrolyte Disorders« . Dans le chapitre sur les étiologies des hypokaliémies, j’ai relu le paragraphe sur hypokaliémie et aspiration gastrique. J’ai (ré)appris la physiopathologie de ce trouble et je trouve surtout que c’est une belle illustration d’un problème médical courant : le raccourci.
Le magnésium est beaucoup utilisé en anesthésie-réanimation. On dispose de deux formes pour une administration IV : le sulfate de magnésium (MgSO4) et le chlorure de Magnesium (MgCl2).
John Snow vient de publier un superbe billet. Encore. Il récidive le cochon.
Dans la mouvance des derniers jours sur les erreurs médicales initié par PUautomne, il nous raconte les oscillations permanentes que vit l’anesthésiste entre période à très haut risque et calme plat. C’est encore plus prégnant (sic) dans l’ambiance de la maternité.
Voilà la difficulté de notre métier.
Vous l’avez bien compris, l’analgésie loco-régionale est pour moi le moyen le plus intéressant de lutter contre la douleur post-opératoire. Je vais maintenant partager avec vous mes pratiques concernant les antalgiques courants.
Dans la suite de mon billet sur les perfusions post-opératoires j’aimerais donner my 2 cents sur les antalgiques post-opératoires. Ma pratique a beaucoup évoluée sur les quatre dernières années. Je suis passé d’une attitude maximaliste à une attitude plus attentiste.
Actuellement j’observe que bon nombre d’antalgiques sont prescrits parce que le médecin anesthésiste (et l’interne encore plus je trouve) craint la douleur de son patient, c’est logique, l’analgésie est un point cardinal de notre métier.
En fait, je pense qu’il faut beaucoup plus évaluer le vécu post-opératoire du patient en commencant par des choses simples quitte à se creuser la tête secondairement. En effet les cocktails larges du type paracétamol-nefopam-tramadol-morphine-ketamine-(gabapentine) apporte un lot d’effets indésirables sous estimés je pense.
Récemment, j’ai reçu un mail pro qui m’a fait rire. Il disait en gros : « bon les gars, on a encore fait une boulette, faut qu’on la fasse la check-list au bloc opératoire ». Cet enthousiasme pour la check-list était naturellement porté par notre collègue qui s’occupe de la « qualité ».
Depuis la lecture de « La Revanche du Rameur » je regarde avec un oeil rebelle ce qui est étiqueté « qualité des soins ». Ayant un peu mieux compris les mécanismes retors qui sous-tendait ce type d’activité.
Néanmoins je trouve ça bien les checklists, j’en suis largement convaincu par mon activité de pilote du dimanche. Pour une fois, je converge avec notre Monsieur Qualité et même l’EBM !
Ce mail est rentré en collision avec une conversation que j’avais eu la veille avec une amie pilote (de tous les jours) et une autre, championne du marketing et des ressources humaines. On discutait justement de ça entre nous. Pour elles, la Médecine fait le grand écart entre une technicité de pointe et une gestion des « facteurs humains » proche de l’inexistant.
Je trouve que les prescriptions post-opératoires sont parfois un peu alambiquées. J’aimerais par le biais de quelques billets expliquer ma stratégie pour des prescriptions claires.
En préambule, je rappelle que des prescriptions ça se date et ça se signe. Les voies d’administrations doivent être précisées, il ne doit pas y avoir d’ambiguïté.
Les perfusions post-opératoires
Il faut les limiter au maximum. Tous les traitements peuvent générer de la iatrogénie, y compris les perfusions : erreurs d’électrolytes, hyponatrémie, infection de cathéter, débit trop rapide de nutrition parentérale, etc.
Externe, puis interne j’ai assisté à l’instauration des corticoïdes aux patients en choc septiques pour améliorer la réactivité de leurs vaisseaux aux amines vasopressives.
Djillalli Annane a consacré une partie de sa carrière à développer et à évaluer l’intérêt de ce traitement et un article dans le JAMA en 2002 a clairement enfoncé le clou : moins de mortalité en administrant de l’hémisuccinate d’hydrocortisone (HSHC) aux patients en choc septique. Ite missa est : HSHC pour les patients recevant de la noradrénaline !
Biblio de rentrée
C’est la rentrée littéraire ! Quelques articles à lire pour les blocs calmes 😉 !
Je sors de garde. Je suis explosé et pas très objectif mais je tiens à vous raconter à chaud, en quelques mots, l’histoire de deux patients dont je me suis occupé cette nuit avec mes collègues.
Dès l’arrivée en garde, appel de l’interne de chirurgie :
« – hello, on a reçu un appel de la clinique de Belleville-de-périph’. Une dame a fait une perforation de l’oesophage pendant une ETO.
Je ne reçois plus depuis plusieurs mois les visiteurs médicaux. Lorsque j’étais CCU/AH j’avais quelques domaines de prédilection comme la nutrition artificielle et j’ai été assez largement « courtisé ». Ces deux années ont servi à nourrir ma réflexion qui a été largement inspirée par mes confrères sur Twitter, membres du Formindep pour quelques uns. Ce billet vient après plusieurs semaines car ça m’exaspère de répéter mes justifications. Ainsi je préfère sereinement écrire une note sur le sujet.
Je continue ma série de fiches de cuisine avec la description de ma pratique de l’induction anesthésique pour de la chirurgie viscérale. Ici la description de la majorité de mes inductions pour un patient « classique » en chirurgie digestive majeure.
IPP EVIL
Aujourd’hui j’ai fait une journée à thème j’arrête l’esomeprazole qui coule dans les veines des 3/4 des patients en post-op de chirurgie digestive. Les internes de chir (que j’adore) m’ont regardé avec des yeux de merlans frits genre « i’ va pas mourir d’un ulcère dis ? »
J’espère que non. Voilà quelques pistes pour réfléchir à deux fois avant de prescrire un IPP non justifié :
(NB, la FDA a même lancé une alerte sur le risque de pneumonie avec les IPP)
update : IPP et insuffisance rénale aigüe par là
en passant
tiens encore un petit coup de pied dans les roubignoles des IPP https://t.co/Ty1MTAiEAD
— nfkb (@nfkb) September 19, 2016