Sagittaire, je cultive l’ambivalence. J’appréhende le concept de la Voie du Milieu en zigzaguant entre les bandes d’arrêt d’urgence… Ainsi j’étais évidemment très enthousiaste en partant pour le marathon de New York mais je quittais la France avec un petit caillou dans ma chaussure, vous savez ce petit rien qui vous gêne mais pour lequel on ne fait rien.
D’abord, sur le plan sportif ma motivation est mollassonne depuis début octobre. Pardonnez moi si je joue les enfants gâtés mais j’avais l’impression d’arriver comme un cheveu sur la soupe à New-York. Mon entrainement de début 2012 a été chaotique, parfois à fond, parfois plus rien. Malgré ça, grâce à l’expérience qui s’accumule j’ai réussi trois jolies performances : mon record sur marathon à Paris en avril, mon record sur semi à Phalempin en mai et l’immense joie d’avoir survécu à ce que je considère comme un « vrai trail » dans les Aiguilles Rouges en septembre.
C’est couillon mais mon appétit sportif est émoussé, le syndrome du « gros apéro » avant un bon resto, vous voyez ce que je veux dire ? Alors il me restait bien l’envie d’effacer 5 centièmes à mon temps sur marathon, mais le challenge est un peu absurde non ? Je sais déjà que le sportif n’est pas vraiment rationnel (voir ici et là et je me rattrape là) mais quand même faudrait pas voir à pousser mémé dans les orties.
Là dessus, ajoutez une catastrophe météorologique et des soucis professionnels juste avant de partir et voilà que le sac de noeuds dans ma petite tête s’empire sévèrement.
Vais-je vivre ce marathon comme il se doit ?
Le week-end du 28 octobre, sortie dominicale à un bon rythme pour me rassurer. Je papote un peu sur Twitter et j’apprends qu’une tempête arrive sur la côte est des Etats-Unis. Frankenstorm qu’il la surnomme les médias. Comme ça ça passe mieux, c’est vendeur (Sandy moyen) et ça ferait presque marrer tiens. Lundi l’inquiétude monte avec actualisation haute fréquence (F5F5F5F5F5F5F5F5F5F5F5) des images radar de la côte est. Mardi l’angoisse augmente avec la constatation des dégâts et la fermeture des aéroports. Tuesday evening (mon cerveau anticipe le changement d’heure et de langue), je pense mon temps à suivre le hashtag #JFK pour savoir si je décolle bien le mercredi. Mercredi, je ne vois pas mon vol sur les tableaux d’affichage. Je erre dans le terminal 2E avant de m’apercevoir que si, miracle, ô miracle, je part, décalé, mais je pars o/ (<- half-victory man or waving guy)
A l’arrivée je suis rassuré, à peine une flaque d’eau par ci par là. « S’ils voyaient ce qu’ils tombent à Lille en octobre, ils la ramèneraient moins hein ». Et puis je finis par marcher dans la ville, je descends vers le sud, il n’y a plus de feux de signalisation, les boutiques sont fermées, des gardes fantômatiques ont le nez collé derrière la vitrine de quelques boutiques avec une frontale sur le front. Impression bizarre.
Malgré tout, show must go on ! Je pars retirer mon dossard. Le Maire a affirmé que ça aurait lieu, c’est bon signe. J’attrape un USA Today sur une table de bistrot et je comprends que le marathon crée une véritable polémique. Des centaines de milliers de personnes à New-York et dans le New Jersey sont brutalement dans une sombre merde et ça jase. Je me dis que le bénéfice économique est tel que la course aura forcément lieu… Je reste avec mon petit caillou dans la chaussure et je pars me balader (comprendre claquer plein de sous)
Hasard terrible, j’atterris dans un Apple Store (mon émancipation a été de courte durée). Et là : passage en FA, l’ordinateur à côté de moi affiche les page de CBS News : Marathon canceled. Je n’y crois pas, je viens de lire un article disant qu’il aurait lieu malgré la polémique, j’affiche tout de suite le New York Times dans Safari : le marathon est bien annulé (bronchospasme serré-serré). Le petit caillou dans la chaussure se transforme en un gros poids sur l’estomac :’-(
Ca fait des années que je pense à cette course. Alors même avec l’appétit émoussé une partie de moi était prête à se dépasser pour une ultime bataille avec le chrono. Dash to the finish line. Cette course mythique racontée par une personne qui m’est chère est inscrite sur ma TODO list depuis des lustres, avant même que le concept de TODO list n’existe ! ce truc germe en moi depuis que je suis gosse, je dois courir sur le pont Verrazzano avec des milliers d’autres âmes. Mais voilà, tenir la logistique de cette course avec une telle dévastation des bien et des hommes ça n’est pas gérable.
Je suis vraiment déçu, je pense à tous les sacrifices, à l’argent dépensé, à ces séances ridicules de Compex, à cette bouffe de cosmonaute ©@bartaire avalée et tutti quanti…
Mais ce truc est en moi, je me dois de courir cette course. Et je le ferai. Je reviendrai. C’est ce que m’a appris la course à pied : « c’est dur ? c’est normal, ça arrive. Bats toi et avance ! »
Billet écrit dans la nuit du vendredi au samedi 3 novembre.
10 réponses sur « Bounce »
Fait attention, on peut voir ton nom !
Ce n’est pas grave. Il n’écrit pas anonymement.
Quand j’ai entendu qu’ils annulaient, j’ai tout de suite pensé à toi. Un peu idiot hein, je sais qu’il y a tous ces gens qui n’ont plus rien, mais je sais ce que tu as traversé cette année. Je pensais qu’ils annuleraient cependant il y avait eu ces annonces « nous maintenons le marathon, nous sommes des américains, nous sommes forts etc ». Il est normal qu’ils annulent, ça aurait pu être indécent.
Oui, il y aura d’autres marathons de new york, d’autres années. Bats toi et avance! Courage!
J’ai été assez surprise qu’ils annulent, je pensais naïvement que pour une ville comme NY « the show must go on ». J’imagine même pas ta déception, et celle des milliers d’autres coureurs (j’ai annulé en catastrophe mon seul et unique semi pour cause d’entorse, je m’en mords encore les doigts, et pourtant c’était à côté de chez moi!). J’espère seulement que l’occasion se représentera pour toi de le faire, histoire de ne pas rester sur ce goût d’inachevé.
Merci à tous pour vos messages de soutien ici ou sur Twitter. Pas d’inquiétude pour l’anonymat, il est assez relatif. (plein de fois où mon dossard apparait déjà sur ce blog, très facile pour un stalker…)
Allez je vais me faire un petit footing pour éliminer tout le bacon des derniers jours 😉 !
Le bacon avec ou sans oeuf au plat? Je plaisante, mais une question vous courez / marchez combien de kilomètre par semaine, en moyenne?
Je viens de constater que mes chaussures sont à nouveau bon à jetter (4 mois, grr) et fait le calcul approximatif de kilomètre par semaine et arrive à 40 à 55 kms/s, selon les envies de toutounes et semaines sans empêchement matinal. Maintennat, je ne sais point si l’usure de chaussure est normale ou non. J’ai lu dans un livre que la chaussure de course est fait pour durer 750 kms ou 6 mois, ensuite elle est usée. Quelle est l’opinion du « pro » ?
Bonne journée
Ah j’adore les œufs alors ils accompagnent forcément un peu de gras de bacon !
Jusqu’à présent mes stats me donnent 45 km courus en moyenne par semaine.
Concernant les chaussures, les règles relèvent un peu de la légende urbaine véhiculée par les vendeurs, un peu comme la notion d’amorti.
La durée de vie de la chaussure va dépendre de la morphologie du pied, du terrain pratiqué, de l’environnement, du soin apporté, de la bio mécanique (torsion) et des matériaux utilisés par le constructeur.
Pour un coureur régulier comme moi on entend souvent dire que 6 mois (800-1000km) est franchement une limite haute pour des chaussures de course.
Après moi je fais une rotation entre mes différentes paires de chaussures et je ne cherche pas l’amorti donc je me suis plus guidé par du feeling ou l’envie d’avoir des pompes récentes pour une course importante.
http://www.lemonde.fr/sport/article/2012/11/04/pas-de-marathon-mais-des-new-yorkais-qui-courent-malgre-sandy_1785520_3242.html
y as tu participé ?
Oui ! https://twitter.com/nfkb/status/265129078846263296
En fait c’est devenu un rendez-vous naturel, je me doutais qu’il y aurait des groupes Twitter ou des initiatives sur Twitter mais je n’ai même pas cherché, c’était trop évident que tout le monde aller se retrouver à Central Park.
L’ambiance était très bonne, les italiens chantaient, les brésiliens frimaient, les sud-américains portaient fièrement leurs drapeaux, c’était fun ! En tout cas il y avait plus d’ambiance que sur les Champs-Elysées à Paris pour le marathon officiel !
Note que si j’étais venu avec un ou deux potes, il est quasi sûr que j’aurais fait les 42,195 km du parcours… là la configuration de mon voyage ne rendait pas ce délire très jouable.
Un pincement au coeur en passant la banderole des 26 miles à Central Park quand même…
Merci pour le partage !!! =)