Depuis une bonne semaine, le monde de l’athlétisme est secoué par l’affaire Clémence Calvin. Cette marathonienne très rapide s’est soustraite à un contrôle anti-dopage alors qu’elle était en stage de préparation au Maroc. Vice-championne d’europe de marathon, elle venait de battre le record de France du 5 km pendant le semi-marathon de Paris (record car elle a refusé… probablement car il fallait un contrôle antidopage). Elle est pressentie pour une grosse perf’ au marathon de Paris. L’affaire a été bien galvanisée par une intervention vidéo de Patrick Montel, le commentateur de l’athlétisme sur France 2.
https://www.youtube.com/watch?v=-sz0BvTk83U
Les bons articles pour comprendre l’affaire s’enchainent sur lemonde.fr et spe15.fr. J’ai d’ailleurs découvert ce très bon site via cette affaire. Clémence Calvin après avoir disparue de la surface de la terre pendant plusieurs jours a donné sa version des faits dans une conférence de presse. Pour moi, tout cela relève d’un story telling navrant avec notamment une instrumentalisation de son propre enfant… je vous invite à regarder sur le site de l’équipe.
Du fait du « no show » à son contrôle, l’athlète a écopé d’une suspension à titre provisoire par l’Agence Française de Lutte Antidopage jeudi. Dernier rebondissement, j’apprends samedi matin que le Conseil d’Etat a invalidé cette mesure car l’athlète n’a pas eu les délais nécessaires pour se défendre. Elle devrait donc courir le marathon de Paris demain. Ne comptez pas sur moi pour l’encourager, je réserve mes cris à mon copain Greg, le colosse de la CAE et aux bonitos (mention spéciale aux américains qui traversent l’atlantique pour le MdP)
Cette histoire ne fait que me renforcer dans mes convictions que le sport de haut niveau est complètement gangréné par le dopage. Je ne crois personnellement plus en aucune grande performance mondiale. Je ne jette pas la pierre aux athlètes, je comprends sincèrement qu’on en arrive là. Et si mon cerveau est émoustillé par toutes les petites histoires qu’on démêle petit à petit, la grande image est pour moi de plus en plus claire : les grandes institutions, les fédés veulent des résultats et du show pour que leur business tourne. Alors même si des gens dans ses institutions veulent du sport propre, je suis persuadé qu’il y a mille arrangements entre amis, mensonges par omission et autres manoeuvres d’autruche. Surtout qu’à bien y regarder les intervenants dans ces milieux se connaissent bien et forment un microcosme où l’entrisme est endémique… Comme le décrit Patrick Montel, c’est tout un système, et même toute une société qui cultive la performance. Je lance souvent la conversation sur le dopage en parlant de la caféine. Majoritairement, les gens trouvent ça normal de boire 5 cafés par jour et que ça ne constitue pas une forme de comportement pour améliorer leurs performances. Moi je pense que si.
Aujourd’hui, après un bon moment de sport entre gentlemen, j’ai fait des étirements en regardant une interview de Bryan Fogel qui a réalisé Icarus (must see +++).
Dans cette longue interview, on retrouve les méandres entre institutions qui disent lutter contre le dopage (probablement plus pour l’affichage que pour avoir un sport propre) et les agences anti-dopage. Ce schéma se retrouve à mon avis à plusieurs échelles.
https://www.youtube.com/watch?v=P2FCBIpKCdI
Avec tout ça, j’en viens forcément à me demander si ça ne sera pas mieux de libéraliser complètement le sport de haut niveau pour cesser l’hypocrisie. On aurait ainsi de vrais gladiateurs dans l’arène. On pourrait alors concentrer la lutte anti-dopage sur les amateurs pour préserver la santé du plus grand nombre. Enfin bon, j’en sais rien au final, je balance ça à la cantonade mais le côté sport exemple, sport modèle pour la jeunesse me parait difficile à tenir. (Surtout quand des parents filent des cachetons à des ados) Comment développer une vraie culture populaire de l’activité physique à grande échelle quand le sport pro est à la fois si valorisé et si dégueulasse ?
A titre personnel, je me demande si je ne dépense pas de l’énergie pour rien à suivre les réseaux sociaux et les forums (Onlinetri) sur ces sujets… un peu comme pour la politique ou l’actualité en général, j’ai le sentiment que je ferais mieux de rester dans ma petite bulle à me consacrer à mon environnement proche et pas « au monde » en général. Ce repli sur soi m’emmerde mais je pense que je me laisse trop facilement aspiré dans les méandres des réseaux et mon jusqu’au boutisme à comprendre un sujet me coute pas mal d’énergie… encore un entrelac mental dans lequel je suis désorienté, bon, une bonne nuit de sommeil et on verra demain si je regarde Paris Roubaix ou pas.
10 réponses sur « L’affaire Clémence Calvin »
Je suis ravi que tu te convertisses. Il est évident qu’il aut arrêter deux choses, les contrôles antidopages qui sont une perte d’argent ridicule pour la société et l’utilisation d’argent public pour le sport de haut niveau.
Bonjour,
Ce serait peut-être plus clair et moins hypocrite, mais alors les vannes seraient plus que largement ouvertes à des manipulations médicales qu’on n’imagine que trop bien AMHA.
Je ne suis pas sûr que la majorité de l’opinion soit prête à regarder les choses si crûment, il y a encore quelques freins, il me semble. D’autant qu’accepter ces idées dans le sport, après la « santé « , ne fera qu’accélérer la mise à disposition de la technologie bio-medicale au service de toutes les satisfactions égotiques…
Je suis d’accord avec toi. Le sport de haut niveau est probablement gangrené jusqu’à la moelle. De temps en temps on fait un exemple parce que ça devient trop voyant.
L’athlète veut une chance de s’imposer dans l’environement truqué ; les fédérations, les clubs et les sponsors veulent faire rentrer l’argent ; mais le public est aussi demandeur de ce spectacle.
Tu ne me feras pas croire par exemple que les rugbymen professionnels tournent à l’eau claire, mais c’est aussi le public qui veut un jeu plus rapide et des plaquages plus violents.
Je ne sais pas si au final il faut laisser faire… On n’en est pas encore à jouer au hockey sur glace d’Enki Bilal au début de La foire aux immortel, mais j’ai bien peur que ça finisse par arriver. Le MMA notamment m’inquiète beaucoup
ah ben ça Joe Rogan et le dopage en MMA, il en cause, là c’est d’autant plus inquiétant qu’il s’agit de coller des pains à l’adversaire, alors si le dopage développe la bestialité et qu’un mec KO finit dans le coma ou pire, c’est doublement moche… Jon Jones est une bonne illustration du problème
J’ai lu ton article en diagonale, car, étant en repli par rapport à l’information je ne connaissais pas cette femme et cette affaire (et ca ne m’a pas donné envie d’en connaître plus).
En revanche, ton dernier paragraphe m’a paru plein de bon sens.
Nenamoins on peut rester ouvert au monde en étant très attentif à son « petit monde » en disant et en choisissant bien quelles causes on suit.
Bises
Sur un malentendu, je me dis que cette ouverture ferait bien augmenter le nombre de candidats – cobayes potentiels… Et pourrait faire progresser la science ?
Mais du coup ce sera comme en VTT, un catégorie avec assistance / une sans ?
Les frais de santé liés aux effets secondaires seront-ils remboursés par la sécu ? 🙂
Je pense que la société n’est pas prête à accepter de lever l’hypocrisie en dérégulant le sport professionnel.
Les frais de santé c’est une super bonne question, du coup si on garde la sécu sociale à la française, ça va ptêt attirer des champions à venir courir sous nos couleurs LOL !
Bernie Eclestone serait sur le coup d’un futur championnat de marathon. Une course par mois aux 4 coins du monde. la F1 c’est fini. Les docs sont les nouveaux ingénieurs motoristes 🙂
Je découvre cette histoire…ça semble faire du bruit.
En tout cas c’est moche. Personne n’en sortira grandi 🙁
J’avais écouté une super émission sur le dopage dans le football. Si on commence à ouvrir les vannes sur l’hypocrisie, ce sport risque d’en pâtir fort. Notamment les effets secondaires des corticoïdes et testo sur le comportement, notamment l’hypersexualité, d’où tous les scandales qui entourent les vies de ces sportifs.
De mon point de vue, on ne peut pas pardonner leurs extravagances sous prétexte que ce sont de grands sportifs et en même temps masquer le fait que leur comportement soit en partie induit.
C’est moche d’associer sport et santé alors que ceux qui atteignent les sommets sont presque obligatoirement dopés. Le dépassement de soi ne passerait que par le dépassement des lois ?
Je fais moi aussi partie de ceux qui voudraient une transparence totale sur les sport de haut niveau et leur prise de produits, avec une éducation en parallèle du grand public sur les risques que ces athlètes prennent quant aux dommages sur leur santé.
A voir, l’émission de John Oliver sur la WWE : https://www.youtube.com/watch?v=m8UQ4O7UiDs