Dans ma quête des méthodes d’entraînement idéales, j’aimerais utiliser des marqueurs de réponses à l’exercice pour jauger leur impact en aigu et au long cours.
L’analyse de la variabilité du rythme cardiaque (HRV) est un outil séduisant dans cette optique. Par le passé, j’avais jugé son utilisation trop contraignante pour un amateur, même pour un pimpin comme moi ! Mais, j’ai découvert une application iPhone qui se targue d’analyser la fréquence cardiaque via l’appareil photo en se basant sur l’onde de pouls : HRV4Training.
Court rappel : l’espace entre chaque battement cardiaque varie tout le temps. Il s’agit d’écarts de quelques dizaines de millisecondes. C’est difficile à déceler cliniquement, mais ça se mesure très bien avec des appareils. Le temps entre deux battements est surtout influencé par la respiration et par le système nerveux végétatif. Le système nerveux végétatif a 2 composantes : le sympathique et le parasympathique. En gros, le système sympathique est stimulé dans les situations de stress, et le parasympathique fait le contrepoids. En gros, le sympathique, c’est l’accélérateur (fight or fly) et le parasympathique le frein (rest and digest). En neutralisant la composante respiratoire dans l’HRV en imposant une façon de respirer, on pourrait évaluer grosso modo l’équilibre entre le sympathique et le parasympathique.
Ensuite, la projection dans le monde sportif est encore un peu nébuleuse, mais les tenants de cette analyse veulent en faire un outil d’évaluation de la tolérance de la charge d’entraînement. Des travaux (avec des effectifs très faibles) rapportent de meilleurs gains lorsqu’un entraînement intense est réalisé lorsque le système végétatif est « reposé ». Je ne pense pas que tout ça soit bien solide aujourd’hui, mais c’est ça le projet.
Joueur, j’ai installé l’app et j’ai commencé à analyser quotidiennement. Je le fais depuis plus de 2 mois.
HRV4Training est une app vraiment bien faite. Je ne me souviens pas avoir eu une telle expérience utilisateur avec une autre application. L’app est vraiment facile à utiliser et tout est super bien expliqué. L’auteur, Marco Altini, la met très régulièrement à jour. Ce ne sont pas des MAJ « cosmétiques », il y a réellement une recherche pour fournir de nouveaux outils utiles à l’utilisateur. De plus, il est incroyable de rapidité et de pertinence dans ses échanges avec les utilisateurs. Bref, on en a pour son argent. Il a publié récemment un article à propos de sa cohorte d’utilisateurs.
En pratique, il faut prendre le temps de s’entraîner pour appliquer son doigt correctement sur l’optique de l’APN. Avec un iPhone 6+, j’ai trouvé qu’il valait mieux ne pas mettre son doigt sur le flash (qui est déporté), mieux vaut appliquer doucement la pulpe de son doigt sur l’objectif de l’APN.
Il est tout à fait possible de s’entraîner sans enregistrer la mesure. Afin de trouver vos repères, faites régulièrement cette manip pour trouver votre façon de faire pour avoir un signal optimal. Si vous n’arrivez vraiment pas à obtenir des données optimales avec l’analyse de l’onde de pouls, vous pouvez utiliser une ceinture cardio bluetooth type Polar H7 à la place.
Au fil de l’utilisation, en collectant plus de données, des fonctionnalités de l’app se débloquent. C’est logique et louable que Marco Altini ait choisi de travailler comme ça car les recherches de corrélation entre 10 couples de données, c’est foireux.
Qu’est-ce que je pense de l’analyse HRV après 10 semaines d’utilisation ? Sincèrement, j’ai appris des trucs, mais je ne suis pas convaincu.
Ce que j’ai appris, c’est qu’il pouvait être utile de faire une moyenne sur quelques jours pour avoir une idée de sa fréquence cardiaque au repos. Lorsque l’on veut calibrer ses intervalles d’entraînement ou avoir une estimation grossière de sa VO2max, comme je le proposais dans cette note, il vaut mieux regarder ce que donne la fréquence cardiaque chaque matin pendant une semaine. Sur l’image ci après, je vous donne la moyenne sur 7 jours glissants de ma FC au repos, ça bouge quand même pas mal ! En moyennant depuis février, j’arrive à un truc cohérent (46-47).
Ensuite, je pense que l’application peut renforcer la prise de conscience de l’importance du sommeil et/ou de plages de repos.
L’analyse HRV fournit beaucoup de chiffres et les auteurs de ces apps fournissent souvent un score dont ils ont le secret qui résume la situation. Ainsi, c’est tout à fait simple à comprendre et à utiliser si vous ne voulez pas vous plonger dans des détails.
Il y a des variations au jour le jour que je n’ai vraiment pas comprises. Où les mesures étaient en contradiction avec mon ressenti. Ainsi, les mesures me trouvaient bien reposé alors que j’avais fait de très gros entraînements la veille (et/ou une garde pas marrante…) et que mon bon sens m’indiquait le repos et a contrario, j’ai parfois eu des indications de méforme sans que je le ressente vraiment. Au long cours, il existe chez moi une corrélation faible entre ma charge d’entraînement et les variations d’une donnée clef appelée RMSSD.
Au total, j’ai appris des choses et ce truc m’amuse. Je pense donc continuer à recueillir les données, plus en espérant que ça serve à l’auteur que pour moi. Enfin, je reste méfiant quant à l’analyse HRV. C’est (encore) un truc débattu dans l’univers des sciences du sport. (Méfions-nous de la pensée magique) Jouez avec l’app, faites vous votre idée !
P.S. une anecdote : chute franche du RMSSD avant l’arrivée d’un épisode infectieux.
5 réponses sur « HRV4Training, un avis après utilisation »
Salut Rémi, à peu près le même retour pour moi.
Les mauvais scores sont corrélés avec les mauvaises nuits, les plus mauvais après les entrainements/stages intenses mais suivis en 48h00 d’une remontée au-dessus de la ligne de base. Les footing lents sont ce qui améliore le plus la mesure moyenne. L’évolution de la FC de repos est au moins aussi bonne indicatrice sur le long terme.
Schématiquement j’en retiens que cela va dans le sens des préconisations d’entrainement lues ces dernières années : beaucoup de lent, quelques séances intensives espacées d’au moins 48h et du sommeil.
Je te rejoins pour dire que l’appli est sympa et pour dire que je vais probablement arrêter de faire des mesures aussi 😉
En fait, je veux bien croire qu’il serait bénéfique de suivre les recommandations de l’app en matière d’intensité d’entraînement mais le problème pour l’amateur que je suis c’est que j’ai des créneaux de temps limité, avec peu de flexibilité.
Ainsi, en lendemain de garde par exemple, l’app va me conseiller de me reposer mais c’est LE jour où j’ai de bons créneaux pour m’entraîner… ainsi si je zappe les deux heures d’entrainement de ce jour là, je pense que faire 2 heures de moins sur mes 7 hebdos aura plus d’impact négatif GLOBAL.
Je ne peux donc pas suivre constamment les recos de l’app (issues de l’étude #2 citée ici). En revanche, petit biais cognitif : si l’app me dit que je suis en forme, je me lâche d’autant plus 😉
Continuer à utiliser l’app pour être utile à l’auteur, quel engagement purée !
c’est passionnant. En plus c’est joli.
Mais d’après ce que j’ai lu (A roche, P Balducci) peut-être que ton historique est encore trop faible pour vraiment dégager et essayer d’interpréter les chiffres.
Et cela renforce encore ma conviction que si on se lance dans ce genre de mesure, il faut tout noter pour pouvoir espérer exploiter : les facteurs de stress (sportifs, pro, perso), les qualités de sommeil et pourquoi pas d’alimentation.
C’est un puits sans fond ?
Polar / Suunto (et Garmin?) ont des tests de ce type. ça donne quoi ?
(Suunto je sais à peu près : c’est infantilisé et non loggé…)
Pour mon cas perso (souvent des footings au saut du lit) : faire le test en me posant au calme 3′ juste avant de partir – avec un log et une interprétation automatique sur ma plateforme movescount/polarflow/garmin connect – serait déjà une belle simplification et un moyen de constituer une bonne base de données !
Je n’ai pas un bon feeling avec AR (j’ai payé du coaching, je ne comprenais dans quelle direction il voulait aller, il part dans tous les sens, je me crispe un peu en entendant ce nom, pas de contentieux financier : j’ai laissé tombé sans rien demander). Balducci connait pas.
J’ai fait le truc depuis fin février quand même, ça commence à faire. Là où tu as raison c’est que je pense que j’ai mis un peu de temps à vraiment trouver comment bien poser mon doigt pour avoir un signal optimal à chaque fois avec un bon pic de l’onde de pouls.
Ensuite, dans HRV4training le sommeil est logué très facilement, et pleins d’autres trucs optionnels d’ailleurs. Si tu veux te faire un gros tableau a posteriori avec tes RMSSD le lendemain de plus de 30g d’alcool c’est possible ! Oui, tu as raison, on essaye de résumer avec deux trois chiffres un statut physiologique qui est bien plus vaste.
Mais en même temps je connais pleins d’exemple en médecine ou un truc très simple est très bon pour apprécier des choses très complexes. La diurèse chez un patient assez sévère en est un. Le concept n’est donc peut être pas à mettre à la poubelle.
Les grosses boîtes travaillent beaucoup avec Firstbeat je crois (qui fait sa grand messe annuelle ces jours ci d’ailleurs je crois)
Le problème qu’a plutôt bien résolu Marco Altini c’est la simplicité pour faire la mesure. Mettre la ceinture mouillée au réveil c’est pas marrant et ça demande une petite logistique nerdique 😉 Les nouvelles montres avec capteurs optiques ne m’ont pas l’air encore assez fiables pour faire des mesures aussi précises qu’arrive à faire HRV4Training avec l’apn. En tout cas HRV4t joue le jeu de l’intégration puisqu’il utilise l’API strava pour récupérer tes données d’entrainement et il pousse vers SportTracks ou Training Peaks tes données d’HRV quotidiennement.
Enfin, je ne suis pas un athlète d’élite, je ne le serais jamais, et peut-être que ce que fait l’élite n’est pas transférable à l’amateur, soit, mais plus je lis ou j’écoute de vrais coaches de pro (de tri/cyclisme) plus j’entends qu’ils se servent peu d’outils technos… Ils observent, bossent et s’adaptent. Alors peut-être qu’il y a des trucs à creuser avec l’HRV mais c’est vrai que c’est compliqué à transposer chez l’amateur avec vie « normale ». Ex : les enfants m’ont laissé dormir. Au réveil mon score est bon ! Ca serait le jour idéal pour faire une bonne tartine de fractionné. Je vais bosser. Intubation difficile par ci, conflit de planning de bloc par là, bref y’a de grande chance pour que mon état de forme soit plus le même que le matin. Alors j’en fais quoi de mon score du matin pour l’entrainement du soir ?
Après y’a d’autres travaux qui tentent de mesurer la charge d’entrainement en évaluant des critères d’HRV en récup à 5 min et 30 min après l’effort par ex. De mémoire ça montrait que les athlètes avaient mieux récupéré des séances d’HIIT que de seuil je crois. Vl’a une autre piste, mesurer après l’effort, si tu rentres pas dans les clous à T+30 c’est peut-être qu’il faut lever le pied sur l’intensité… Ché pas… et pis eud façon moi je suis coincé avec ma saloperie d’angine là, je boude 😉